jeudi 14 mars 2013

La Présence Française dans la reveu Pensamiento Critico (1)



La gauche française observait avec attention le processus de la Révolution Cubaine.
Par, Vilma N. Ponce Suarez
Traduit par, Alain de Cullant.






" Les Idées " Installation. Francisco Rivero



Au mois de février 1967, une nouvelle revue ayant le nom suggestif dePensamiento Crítico (Pensée Critique) s’est insérée dans le panorama culturel cubain. La publication créée par un groupe de professeurs du département de Philosophie de l'Université de La Havane était destinée à diffuser des textes théoriques et politiques contemporains des différentes tendances et latitudes ; ainsi que de stimuler le débat sur certains thèmes d’actualité. Les professeurs étaient convaincus que c’est seulement en connaissant la variété des propositions théoriques marxistes qui coexistaient dans cette scène et les particularités historiques et structurelles de la nationale et la réalité de l'Amérique Latine, qu’il serait possible de développer un marxisme efficace quant à la transformation révolutionnaire du tiers-monde.
Les professeurs se sont intéressés spécialement à étudier les projections des philosophes et des sociologues français de tendance marxiste car, à cette époque, leurs débats philosophiques ont eu un grand impact sur la scène politique en proposant le renouvellement de cette théorie. C’est pour cette raison que certains des livres les plus controversés de ces auteurs ont été publiés par Ediciones Revolucionarias, où plusieurs enseignants occupaient différentes responsabilités (1). Mais ce souci de propager les idées des plus éminents penseurs français du moment s’appréciait en lisant les pages de leur revue Pensamiento Crítico.
À Cuba, pendant les années soixante, a eu lieu un intense échange entre les intellectuels français et leurs homologues nationaux. En particulier, la gauche politique de ce pays, depuis le triomphe de la Révolution Cubaine, observait avec attention ce processus révolutionnaire contredisant toutes les prédictions existantes au sujet des possibilités du triomphe du socialisme dans l'hémisphère occidentale. Le résultat a été les fréquentes visites à l'Île des écrivains, des journalistes et des artistes français intéressés à connaître de prés ce qui se passait. Un échantillon de ceci se trouve au Congrès Culturel de La Havane (janvier 1968), une rencontre internationale dans laquelle la délégation française était la plus nombreuse, avec approximativement 66 membres (2). Il y avait des points coïncidents dans les réflexions de nombreux membres de la gauche française et le discours politique du gouvernement cubain sur des faits importants tels que l’indépendance de l’Algérie du colonialisme français et la lutte du peuple vietnamien contre l'agresseur yankee.   
Fernando Martínez Heredia se trouvait à la tête de l'équipe de rédaction dePensamiento Crítico (1967-1971), il était alors directeur du Département de Philosophie. À côté de lui travaillaient les professeurs José Bell Lara, Jesús Díaz, Aurelio Alonso, Thalía Fung, Ricardo J. Machado et Mireya Crespo. La conviction sur la nécessité et l’importance de cette tâche a faits qu’ils l’ont assumé en sacrifiant leurs heures de repos et sans percevoir la moindre rémunération. En même temps, tous ont participé, comme la majorité du peuple, aux nombreuses activités politiques, économiques, culturelles et de défense convoquées par la direction de la Révolution durant ces années.   
La réalisation des 53 numéros a été un travail qui a exigé l’appui d'autres collègues du département, lesquels ont collaboré dans la révision des preuves de galée, la sélection des travaux, la présentation des articles, etc. (3). Jacinto Valdés-Dapena Vivanco a eu un rôle important comme responsable, dès 1968, de la réception, au moyen de l'échange, de nombreux livres, revues et autres textes de différents pays. Ce processus a fini par s’établir avec plus de cent publications périodiques dont le contenu était étudié par les professeurs afin de déterminer lesquels seraient reproduits dans chaque édition. Des liens se sont aussi créés avec des intellectuels étrangers qui ont visité l'Île, ou qui connaissaient la revue et s’y sont intéressés car leurs travaux étaient publiés dans ses pages. Pour réaliser ce travail la traduction des documents était nécessaire, dans le cas du français, elle a compté la participation de la professeur Nora Espí et du traducteur Felipe Estrada.   
Quarante et un pays de tous les continents ont été représentés dans la revue, dont trente-trois auteurs français. Parmi eux se trouvaient des journalistes, des écrivains, des philosophes, des sociologues, des anthropologues et des politiciens. Ils ont abordé divers thèmes, dont des analyses sur le structuralisme et sur le profond éclatement social des mois de mai et juin 1968 à Paris. La revue a dédié ses numéros 25-26, correspondant à février-mars 1969, à ces événements. La sélection monographique a été sous la responsabilité de Jesús Díaz, José Bell Lara et Aurelio Alonso, qui ont pris certains travaux dans les revues Le Nouvel Observateur et Partisans. Une des valeurs de ce numéro a été l'inclusion des textes de représentants de différentes tendances politiques, aussi bien de la gauche que de la droite. Là apparaissent des valorisations, coïncidentes ou non, d’éminents théoriciens tels que Raymond Aron (politologue, philosophe et professeur de Sociologie), Jean Paul Sartre (philosophe et écrivain français, directeur de Les Temps Modernes), Alain Geismar (professeur de Physique, membre du Parti Socialiste Unifié durant la guerre d'Algérie et ex secrétaire général du Syndicat National de l'Enseignement Supérieur) et de Roger Garaudy (philosophe français). Des opinions de leaders estudiantins ont également été incorporées, comme celles de Daniel Cohn-Bendit, étudiant en Sociologie de l'Université de Nanterre, et Jacques Sauvageot, vice-président de l'Union Nationale des Étudiants Français et  membre du Parti Socialiste Unifié. Les deux jeunes ont offert leurs visions sur le développement du mouvement contestataire et ont critiqué le Parti Communiste et la Fédération Nationale des Étudiants de France pour se maintenir en marge du mouvement et pour proposer des élections comme la seule solution (4).
Lors de la lecture des ouvrages publiés dans le volume 25-26, on constate les critères de certains auteurs, comme c’est le cas de Raymond Aron et de Jean-Paul Sartre. Alors que le premier se lamente de ce qui se passe dans les universités, Jean-Paul Sartre pense que Raymond Aron était indigne d'être professeur  pour son incapacité de douter de lui-même et d'accepter que les idées changent et puissent être questionnées par les nouvelles générations. Sartre critiquait en particulier son refus à la demande estudiantine que les élèves participent aux élections du personnel enseignant (5).
D’autre part, Roger Garaudy, dans La rébellion et la révolution, considère que la violence affichée par les forces de police a contribué à la prise de conscience des étudiants, ce qui a transformé la lutte contre la structure actuelle de l'Université en une confrontation envers l'appareil de l'État. Garaudy souligne aussi la nécessité de maintenir une étroite et profonde alliance entre le mouvement estudiantin et l’ouvrier comme gage de réussite dans cette lutte. En suivant une telle ligne de pensée, il a critiqué le philosophe allemand Herbert Marcuse, considéré par certains comme le père spirituel de Mai 68 en France et en Allemagne,  pour ne pas reconnaître le rôle majeur qu'avait la classe ouvrière dans ces moments historiques. Après s’être référé à d'autres de ses incongruités il a conclu que sa thèse était (...) une interprétation et une déformation dogmatique de la pensée de Marx (6). Avant la publication de cet article, la revue avait mis ses lecteurs au courant de certaines réflexions philosophiques d’Herbert Marcuse et elle a publieMax Weber : rationalité et capitalisme et La tolérance répressive (7).
Notes
 1 - L'idée de créer Ediciones Revolucionarias est survenue en 1965 dans le Département de Philosophie de l'Université de La Havane, la majorité de ses professeurs a participé directement à la sélection des textes qui seraient publiés. Rolando Rodríguez García, qui était à la tête du Département à ce moment, a assumé la direction, Fernando Martínez Heredia était sous-directeur et Marta Blaquier Ascaño responsable du dessin. 
2 - Gaveta del Fondo del Congreso Cultural de La Habana, 1968. Archives Nacionales de la Cultura.
3- D’autres professeurs ont apporté leur contribution dans diferentes tâches tels que : Hugo Azcuy, Felipe Estrada, Delia Luisa López García, Gladys Brizuela, Pedro Pablo Rodríguez, Marta Núñez, Ilia Villar, Marta Pérez Rolo, Germán Sánchez, Elena Díaz, Eramis Bueno, Luciano García Garrido, Marta Blaquier, Ramón de Armas et Carmen Otero (secrétaire).
4 - Cohn-Bendit, Daniel.  El viernes 22 de marzo (...). Pensamiento Crítico (La Havane) (25.26) : 215-250; février-mars 1969. Sauvageot, Jacques.  [Entrevista a…]. Pensamiento Crítico (La Havane) (25.26) : 215-250; février-mars 1969.
5 - Sartre, Jean Paul. El movimiento estudiantil: una crítica radical de la sociedad. Entrevue Serge Lafarie. Pensamiento Crítico (La Havane) (25.26) : 215-250; février-mars 1969.
6 - Aron, Raymond. Reflexiones de un universitarioPensamiento Crítico (La Havane) (25.26) : 215-250; février-mars 1969.
7 - Garaudy, Roger.  La rebelión y la revolución.  Pensamiento Crítico (La Havane) (25.26) : 215-250; février-mars 1969.  Marcuse, Hebert. Max Weber: racionalidad y capitalismo.  Pensamiento Crítico (La Havane) (25.26) : 215-250; février-mars 1969. La tolerancia represiva.  Pensamiento Crítico (La Havane) (25.26) : 215-250; février-mars 1969.     









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