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Balade universel e parisienne d œuvre
en oeuvre.
Francisco Rivero
Photos, Francisco Rivero
Généralité | |
Dans la forme que nous lui connaissons, l’affiche de cinéma est née en même temps que l’industrie du cinéma. « L’invention du siècle » et son « argument de vente en papier » marquent tous deux les débuts de la civilisation de l’image. Issu des baraques foraines, le spectacle cinématographique devient bientôt l’affaire des ingénieurs et des industriels. Les affiches des origines intimement liées à l’histoire du spectacle cèdent la place à un genre autonome, dernier maillon de l’intégration verticale de l’industrie cinématographique qui se fait en France autour de quelques grandes firmes avant la Première Guerre mondiale. Dés le début des années 1900, des sociétés comme Gaumont ou Pathé éditent elles-mêmes leurs propres affiches en faisant appel à des artistes maisons ou à des ateliers spécialisés. La définition d’un standard technique de grande taille destiné à l’affichage dans les « théâtres cinématographiques », c’est-à-dire les salles de cinéma, l’intervention d’un artiste ou d’un groupe d’artistes artisans qui s’inscrivent dans la tradition française où l’affiche est généralement signée, participent à l’apparition d’un genre nouveau et autonome. L’affiche de cinéma « à la française » L’internationalisation de l’objet cinématographique, la montée en puissance de l’industrie cinématographique américaine, la mise en avant des acteurs devenus des vedettes et l’évolution de la technique d’imprimerie qui remplace la lithographie sur pierre par la technique de la gravure sur zinc, vont donner au genre « affiche de cinéma » ses caractéristiques propres et définitives, le démarquant une bonne fois pour toutes du simple affichage publicitaire. On sort de l’imagerie « fin de siècle » pour entrer dans la communication, dès les années 1920, période où l’affiche de cinéma commence à raconter elle-même une histoire avec ses personnages, son action et où elle est destinée à son public. L’intervention de la photographie dans la technique d’imprimerie à la fin des années 1950 parachève cette évolution sans pour autant que l’affichiste disparaisse dans la tradition française. Ainsi le support publicitaire se rapproche de son objet, le film, jusqu’à se fondre avec lui, d’autant plus en France qu’à l’étranger l’affichage demeure un support publicitaire plus important. Ainsi les deux inventions françaises que sont le cinéma et l’affiche continuent d’avancer de concert à travers l’affiche de cinéma « à la française ». L’affiche de cinéma dans les collections publiques Historiquement, l’affiche de cinéma intègre les collections publiques de deux façons : par la conservation du film lui-même, c’est-à-dire dans le cadre des cinémathèques, et par la conservation de l’objet imprimé, c’est-à-dire dans le cadre des bibliothèques. En ce qui concerne les bibliothèques, le privilège du dépôt légal donne à la Bibliothèque nationale de France (BNF) une place déterminante. Les affiches sont conservées au sein du département des Estampes. Parallèlement, le module jusqu’à présent autonome au sein de la BNF que constitue le département des Arts du spectacle (ex-Bibliothèque de l’Arsenal) a constitué une collection très importante tournée vers les affiches du cinéma des origines et du cinéma muet. En ce qui concerne les cinémathèques, c’est bien entendu la Cinémathèque française qui fut le haut lieu de la conservation des affiches de cinéma. Le grand collectionneur que fut Henri Langlois n’a jamais négligé l’affiche – pas plus qu’il n’a négligé les autres démembrements du film (photos, maquettes, costumes, etc.) –, aujourd’hui conservée au sein du Centre national de ressources documentaires de cinéma qu’est la Bibliothèque du Film (BiFi), ainsi qu’au service des Archives du film. La cinémathèque de Toulouse est un autre lieu de conservation de dimension nationale. A côté de ces grandes collections, il faut citer d’autres institutions privées, comme le Musée Gaumont ou les archives de la firme Pathé, des institutions municipales comme la bibliothèque Forney à Paris, l’Institut Lumière à Lyon ou la Bibliothèque municipale de Chaumont (collection Dutailly). A côté de ce secteur public et parapublic, il faut mentionner l’activité commerciale liée à l’affiche de cinéma à travers les galeries spécialisées, les ventes aux enchères ou tout le réseau des collectionneurs privés. Parmi ces ensembles, la BiFi se taille la part du lion aussi bien par la qualité et la quantité de ses collections que par leur accessibilité à la consultation et les perspectives d’enrichissement de ce fonds. |
Description de la collection d'affiches de la BiFi |
A la rentrée 2000, l'ensemble des affiches conservées à la BiFi porte sur plus de 30 000 unités, dont 13 000 sont numérisées et, de ce fait, accessibles à la consultation. Cet ensemble se décompose lui-même entre 10 000 affiches françaises et 3 000 affiches étrangères. Parmi les affiches françaises, on en recense environ 4 500 antérieures aux années 1970, c'est-à-dire considérées comme anciennes et déjà rares. Ce sous-ensemble peut être décomposé en plusieurs périodes qui recoupent les grandes séquences de l'histoire du cinéma, et aussi celles de l'histoire de l'affiche aussi bien du point de vue de la technique et de la fabrication que de celui du contenu graphique et même de la destination de l'affiche (histoire de l'affichage et des supports de l'affiche). Ces périodes sont les suivantes : - le pré-cinéma ; - le cinéma des origines (1896-1918) ; - le cinéma muet (1919-1929) ; - l'âge d'or du cinéma français (1930-1945) ; - la sortie de la guerre et les années 1950 (1946-1959) ; - la Nouvelle Vague et les années 1960 ; - les affiches récentes (années 1970-1980-1990). |
L'affiche de cinéma raconte une histoire du cinema |
L'affiche de cinéma par sa destination même, c'est-à-dire les espaces aménagés à cet effet dans les salles de cinéma, même si elle déborde aujourd'hui de ce cadre intraprofessionnel, est liée à l'exploitation : elle accompagne la copie du film du distributeur à l'exploitant. C'est pourquoi elle a un prix syndical que l'exploitant a payé dès l'origine du cinéma et qu'elle appartient à celui-ci. Ainsi elle est le complément de la copie et voyage avec elle de la même façon que les photos dites d'exploitation par opposition aux photos de tournage, de plateau ou même de promotion publicitaire, et elle procède de la vie physique du film. C'est dans les manuels d'exploitation du film que l'exploitant choisit les éléments du matériel publicitaire qu'il compte utiliser, dont l'affiche. Elle est le produit d'un acte commercial : la commande. Celle-là peut émaner de différents protagonistes parties prenantes aux « produits film », mais aujourd'hui c'est le distributeur qui en a la charge même si d'autres intervenants ont ou auront leur mot à dire. Ainsi originellement dépendante, sa conception comme sa diffusion porteront les stigmates de la commande initiale. |
L'affiche de cinéma raconte une histoire de l'imprimerie | |
L'affiche de cinéma raconte une histoire artistique | |