lundi 22 octobre 2012

...au risque du conformisme

 
 
 

Partout les mêmes artiste au risque du conformisme

 
 
 
 
 
 



DÉBAT - Alors qu'un phénomène inquiète les amateurs : pourquoi voit-on partout les mêmes artistes ?


Quand un nouveau musée privé ouvre à Oslo, dans un des rares pays sans problème de dettes comme la Norvège, tous les regards se tournent vers le Nord. Que va-t-on découvrir à l'Astrup Fearnley Museet, fer de lance du plus grand collectionneur scandinave? Né en 1933, Hans Rasmus Astrup, armateur et financier, est apparenté au peintre romantique Thomas Fearnley, dûment accroché à la Nasjonalgalleriet d'Oslo. Dans son musée tout beau tout neuf, on retrouve à peu près les mêmes artistes que partout. À Los Angeles, chez Eli Broad, ou à Venise, chez François Pinault, deux financiers en acier. Ou plus prosaïquement dans un bon catalogue de ventes contemporaines de New York ou Londres. Au pays de Munch le solitaire, le contestataire et l'incompris, voici venu l'ère des stars planétaires.
Soit une salle complète de Damien Hirst, la série paradisiaque et 100 % sexe de Jeff Koons, un immense tableau sombre d'Anselm Kiefer avec plomb et en paille, une sculpture géante et obscène de Takashi Murakami à l'entrée et, à la place d'honneur, les très grands formats barbouillés du peintre américain Dan Colen, valeur montante de la galaxie Gagosian. Au vernissage de ce lieu superbement ancré dans le port d'Oslo par l'architecte Renzo Piano, tout le marché de l'art international était au rendez-vous, dithyrambique. Les directeurs de musée, venus de Hambourg, Paris ou Londres, étaient plus circonspects devant cet «art mené à la baguette par le marché et ses lois».
Et l'art dans tout ça? C'est tout le débat qui se dessine, de plus en plus fermement, derrière le phénomène de masse qu'est devenu l'art contemporain. Que retenir de ce flot uniforme? «Depuis la Renaissance, l'histoire de l'art n'a retenu que de 1 % à 5 % des artistes, souligne Marc Bayard, historien du XVIIe et spécialiste du décor de théâtre baroque. Tout le reste a été oublié. On peut penser que la même loi sera appliquée à l'art contemporain et que 90 % de ce qui est célébré aujourd'hui sera oublié dans le futur.» Paradoxe? Cet ancien pensionnaire de la Villa Médicis est le directeur artistique de la Carte blanche que la Manufacture des Gobelins offre cet hiver aux peintres Yan Pei-Ming et Pierre Buraglio. Il y a accroché le haut triptyque du plus français des artistes chinois dans une lumière pâle d'église.

«Interdit de juger»

«Ce qui me gêne dans l'art contemporain, dit encore Marc Bayard, c'est qu'il est interdit de juger. On a juste le droit de dire: c'est intéressant! L'art est devenu un média-spectacle, à l'image de la société-spectacle dénoncée par Guy Debord.» Critiquer, rappelle-t-il, cela peut être confronter le contemporain «pas toujours novateur, pas toujours virtuose, souvent suiveur et copieur», à l'histoire de l'art la plus éclatante. «Nous souffrons aujourd'hui de l'impact énorme de Marcel Duchamp sur des générations d'artistes, stigmatise-t-il. Ce révolutionnaire des idées avec ses fameux ready-mades a eu beaucoup trop d'enfants! Il faut revenir au geste de l'artiste, à l'unicité, au tempérament, au fond derrière la forme.»
«Je fais de la vraie peinture, c'est tout mon scandale!», conclut Yan Pei-Ming, peu convaincu par le talent ou la sincérité de son compatriote Ai Weiwei, star mondiale de la dissidence. «L'art est devenu un maelström qui attire grands financiers, spéculateurs, experts autopromus et consommateurs aveugles dans sa spirale, estime Patricia Marshall, art advisor depuis vingt ans entre Paris, Los Angeles et Mexico. On l'a vu aux ventes de Londres la semaine dernière. Tout le monde suit tout le monde. Un nom sort du chapeau et c'est la ruée, cette fois sur les Californiens Fred Tomaselli ou Mark Grot­jahn. La cote s'enflamme un an, puis retombe à plat. Ces passions éphémères oblitèrent les grands artistes, comme Franz West ou Mike Kelley.» Presque le jeu des chaises musicales.














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