jeudi 10 janvier 2013


Michel Bouquet, en paterfamilias de la peinture française.
Michel Bouquet, en paterfamilias de la peinture française. Crédits photo :

 MARS DISTRIBUTION




Le cinéaste Gilles Bourdos évoque la vieillesse du peintre incarné par Michel Bouquet.


Renoir père et Renoir fils, Pierre-Auguste et Jean: ce fut une exposition en 2005 à la Cinémathèque française. C'est désormais un film de Gilles Bourdos sur la vieillesse du peintre et la naissance de la vocation du cinéaste: double difficulté. Comment entrer en concurrence, ou en résonance, avec deux grands modèles esthétiques, sans avoir l'air de les copier?
En 1915, sur la Côte d'Azur, une jeune femme pose pour le peintre. Christa Théret, chair d'abricot et cheveux dans le soleil, pas tout à fait assez grassouillette pour être un vrai Renoir d'époque, affole un Michel Bouquettrès roi Lear, parfait en paterfamilias de la peinture française. Elle passe à bicyclette parmi les gueules cassées revenues du front, comme une baigneuse traversant un tableau d'Otto Dix. Elle brise les assiettes peintes par «le patron». sur des tommettes de cuisine style Côté Sud. Du point de vue de l'histoire de l'art, rien à redire. Le film a bénéficié des conseils de Sylvie Patry, commissaire de la grande exposition «Renoir au XXe siècle» au Grand Palais, et d'Augustin de Butler, qui a publié les Écrits et entretiens du peintre (Éditions de l'Amateur), réunissant tous les textes, paroles rapportées, propos de table, dont Renoir n'était pas avare. Du coup, les dialogues sonnent juste. Les décors, même si ce ne sont pas ceux de la maison des Renoir, les Collettes à Cagnes-sur-Mer, en pleine rénovation, sont vraisemblables. L'utopie méridionale est un des charmes du film. La lumière est jolie comme dans Jean de Florette, les filles se déshabillent dans les torrents, les tissus provençaux volent avec les chapeaux de paille, tous ces tableaux suaves ont un côté XVIIIe siècle et calendrier des postes.

            Vieillard amoureux de la lumière

Grâce à Michel Bouquet, désespéré, miraculeux, torturé par les rhumatismes, ce film trop joli réussit à être un peu plus qu'un agréable livre d'images. L'acteur donne une grandeur tragique au vieillard amoureux de la beauté et de la lumière. Le meilleur acteur du film, pourtant, c'est le mystérieux Guy Ribes, faussaire qui sortait de prison quand Gilles Bourdos lui demanda d'être Renoir, de jouer les mains qui peignent. Il atténue avec des jus transparents les ocres et les roses, ses ­Renoir de cinéma sont dignes du Musée d'Orsay. Sacha Guitry, en 1915, était venu voir Renoir avec une caméra. Cela donne quelques minutes bouleversantes, reprises dans Ceux de chez nous, où l'on voit ces mains déformées qui ne vivent que pour ­tenir les pinceaux.
• Renoir,drame de Gilles Bourdos, avec Michel Bouquet, Christa Teret et Vincent Rottiers.








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