lundi 14 octobre 2013

Bill de Blasio, le démocrate de New York











Le démocrate Bill de Blasio a remporté mardi à New York les primaires de son parti en vue de l'élection du maire en novembre, désormais favori pour succéder à Michael Bloomberg, qui a effectué trois mandats depuis janvier 2002 et ne peut enbriguer un quatrième à la tête de la ville la plus peuplée des Etats-Unis, avec ses 8,3 millions d'habitants.


Celui qui se présentait comme l'anti-Bloomberg a remporté 40,2 % des voix démocrates, selon des résultats portant sur 97 % des bureaux de vote, indique leNew York Times. Ce seuil de 40 %, s'il est confirmé, lui garantit l'investiture. En dessous, un deuxième tour aurait été organisé.
M. de Blasio, le médiateur de la ville et le plus à gauche des candidats, devrait ainsi affronter le 5 novembre le républicain Joe Lhota, qui a obtenu mardi 52,4 % des voix aux élections primaires républicaines. Mais New York est une ville largement démocrate et M. de Blasio, sauf surprise, semble bien placé pourdevenir son prochain maire, après douze ans passés sous la férule du maire milliardaire Michael Bloomberg.

M. de Blasio, 52 ans, a obtenu la victoire face à l'ancien contrôleur financier de la ville Bill Thompson – qui avec 26 % des voix a refusé mardi soir de reconnaître sa défaite – et 15,5 % à la présidente du conseil municipal Christine Quinn, qui s'est effondrée après avoir été en tête de la course pendant des mois.


L'ANTI-BLOOMBERG

Anthony Weiner, l'ancien représentant dont la campagne s'était fracassée en juillet après de nouvelles révélations sur ses envois de messages à caractère sexuel à des inconnues sur les réseaux sociaux, a sombré à 4,9 %, derrière cinquième candidat, John Liu a récolté 7 % des voix. En juillet, M. de Blasio était encore quatrième dans les sondages et sa progression spectaculaire dans les dernières semaines a pris de court de nombreux analystes.

Les New-Yorkais semblent ainsi confirmer leur envie de changement. Bill de Blasio avait fait campagne comme l'anti-Bloomberg, en promettant d'augmenterles impôts des New-Yorkais les plus riches pour financer l'école maternelle pour tous en dessous de 4 ans, un projet jugé irréaliste par ses adversaires. Michael Bloomberg l'avait accusé de mener une campagne "raciste" et de "guerre des classes" et d'avoir une stratégie "destructrice" en opposant "deux villes".


Mardi soir, cet Italo-Américain de 1,95 m était entouré de sa femme afro-américaine, Chirlane McCray, et de leurs deux enfants, Chiara et Dante, à la coupe afro devenue célèbre, pour remercier les New-Yorkais de leur confiance. Il s'est engagé "à changer les politiques qui ont laissé pour compte tellement de New-Yorkais", a de nouveau dénoncé "le conte de deux villes", la politiquecontroversée des fouilles au corps ("stop and frisk") de la police new-yorkaise, qui vise surtout les jeunes Noirs et Hispaniques, et les fermetures d'hôpital.

Considérée comme "l'héritière" de Michael Bloomberg, Mme Quinn, qui espéraitdevenir la première femme et la première lesbienne à diriger la plus grande ville des Etats-Unis, avait été longtemps en tête de la course et son échec est d'autant plus cinglant. Elle n'a fait aucune déclaration.

Des primaires étaient également organisées pour le poste de contrôleur financier de New York. Eliot Spitzer, l'ancien gouverneur démocrate de New York, qui avait démissionné il y a cinq ans en raison d'un scandale le liant à des prostituées deluxe, y tentait son retour en politique. Mais il a perdu face à son opposant Scott Stringer, qui a récolté 52,1 % des voix, contre 47,9 % à M. Spitzer, selon des résultats portant sur 97 % des bureaux de vote.





Bill de Blasio, le démocrate qui renvoie aux New-Yorkais une image positive d'eux-mêmes




                LE PLUS À GAUCHE DES CANDIDATS DÉMOCRATES

Depuis quelques semaines, M. de Blasio, 52 ans, le plus à gauche des candidats démocrates, se positionne comme l'anti-Bloomberg. Du haut de son mètre quatre-vingt-dix, il domine la petite assemblée. "En douze ans, le maire a fermé douze hôpitaux, cinq autres sont dans le collimateur, il n'a rien fait pour sauver Saint-Vincent", lance-t-il. "Avons-nous vraiment besoin de plus d'appartements de luxe ?" "Non !", répondent à l'unisson ses supporteurs, dont les cris d'enthousiasme se perdent un peu dans le bruit des voitures.

Pour cet événement, il s'est entouré du chanteur et militant Harry Belafonte, toujours fringant à 86 ans, et des actrices Susan Sarandon et Cynthia Nixon, qui ont énormément œuvré pour lever des fonds parmi les personnalités de gauche.

"Les primaires n'intéressent que peu de militants, mais nous devons nousmobiliser pour que Bill passe au second tour", insiste Mme Sarandon. Car, si l'enthousiasme est grand depuis que leur candidat devance ses adversaires dans les sondages – 30 % des intentions de vote mi-août selon l'université de Quinnipiac, contre 24% pour Christine Quinn [une avance qui s'est accrue début septembre, à 43 % contre 18% pour sa rivale] –, les fans de M. de Blasio restent prudents. La course est loin d'être gagnée.

                  LE "FEEL GOOD CANDIDATE"

Surtout contre Mme Quinn, qui dispose d'une machine électorale plus solide et mieux financée. "Elle ne fera que reprendre le programme de Bloomberg dont elle est la copie conforme", estime David Loewenguth, responsable d'une ONG s'occupant des enfants atteints du sida et qui est venu soutenir M. de Blasio. "New York est devenue une ville de riches. A Manhattan, les gens ne sont intéressés que par la valeur de leur appartement. De plus en plus de New-Yorkais doivent seloger dans des quartiers périphériques, mal desservis par les transports en commun, et personne ne défend leurs droits."

Bill de Blasio, ancien étudiant en affaires publiques, est loin d'être un néophyte, mais ses adversaires affirment qu'il n'a pas assez d'expérience. Son plus grand fait d'armes est peut-être d'avoir dirigé la première campagne sénatoriale d'Hillary Clinton en 2000, alors qu'elle venait tout juste de s'installer à New York après avoirquitté la Maison Blanche. Il a siégé pendant huit ans au conseil municipal, comme l'un des représentants de Brooklyn, sous la présidence de sa grande rivale,Christine Quinn, et depuis 2010 il occupe le poste de médiateur de la Ville.


M. de Blasio est aussi le "feel good candidate". Avec sa famille multiraciale et son nom aux consonances italiennes (il s'appelle en fait Warren Wilhelm, mais a pris tout jeune le nom de sa mère), ce natif de New York renvoie aux New-Yorkais une image positive d'eux-mêmes. Qui plus est, il serait l'un des rares "Brooklyniens" àoccuper la mairie d'une ville souvent identifiée à Manhattan.
Il vit à Park Slope, le quartier le plus "bobo" de Brooklyn, avec son épouse,Chirlane McCray, et ses deux enfants adolescents, Dante, qui arbore une superbe coupe afro, et Chiara. Chirlane, qui se définit comme auteur et poète, était une militante homosexuelle – en 1979, elle publie un article dans le magazine Essencetitré "I am a lesbian" – avant de rencontrer son futur époux en 1991. Elle écrivait alors les discours du dernier maire démocrate de la ville, David Dinkins. Ils se marient trois ans après sous un arbre de Prospect Park, aux sons de sérénades italiennes et de tambours africains.

Seul hic à ce portrait presque parfait, M. de Blasio avoue qu'il est un grand supporteur des Red Sox, l'équipe de base-ball de Boston. S'il veut devenir maire, il lui faudra sans doute accorder ses faveurs aux Mets ou aux Yankees, comme avait dû le faire avant lui Michael Bloomberg. Les New-Yorkais sont prêts au changement, mais il y a des limites.















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